Il y a plaisir à saluer l'arrivée d'un philosophe tout neuf qui soudain bondit dans le cortège
dionysiaque. Plus on est de fous plus on pense le proverbe dit vrai et notre temps de misère
a plus que besoin de se refaire - s'il se peut - une vigueur spéculative. Il y a plus que du
plaisir une vraie jubilation lorsque le tout neuf philosophe affirme une pensée de la
jouissance de l'abondance et de la dépense au sens de Bataille (ici toujours discrètement mais
efficacement présent). Une pensée énergique au sens le plus - oserais-je dire vitalisant du
terme. L'energeia n'a-t-elle de sens que depuis l'être ? N'y a-t-il pas une autre énergie à
penser ? Une énergie non pas de l'être ni relative à celle extraite de la nature pour des fins
productives et économiques mais une énergie excédentaire une sorte de dépense improductive
(Bataille) de la vie ? Une énergie qui serait le luxe biologique du vivant.Ce luxe biologique
Valentin Husson le pense comme - on ne peutplus dire ontologique - comme existence en un sens
qui se dérobe à Heidegger et à son sens de l'être pour affirmer un avoir à être selon lequel
l'être se dissipe au-delà de toute consistance tandis que l'avoir à prend toute l'énergie d'une
vie en débordante envie d'elle-même.Jean-Luc Nancy