Après la Seconde Guerre mondiale c'est par le roman que nombre de Français choisirent de
penser un conflit qui bien que moins sanglant que la Première Guerre mondiale d'un point de
vue strictement français se révéla bien plus destructeur en termes de valeurs. Parmi les très
nombreux romans abordant ce sujet dans l'immédiat après-guerre plusieurs d'entre eux se
distinguent par un immense succès public et critique démontrant par là-même qu'ils répondaient
à une certaine attente de leurs contemporains. Ce sont ces best-sellers écrits par Jean-Paul
Sartre Simone de Beauvoir Romain Gary Jean-Louis Bory et Jean-Louis Curtis qui forment le
socle de cette étude pluridisciplinaire se situant au croisement de l'histoire culturelle de
la narratologie et de la poétique. De bords politiques divers ces romanciers ont tous refusé
la collaboration et participé de près ou de loin tardivement ou non à la Résistance. Les
Allemands les ennemis d'hier sont évidemment omniprésents dans ces textes. Pourtant les
notions d'identité et d'altérité étant étroitement liées (puisque c'est bien l'Autre par ses
différences qui révèle l'identité d'un individu ou d'un groupe) il s'agira moins dans cette
étude de rendre compte d'une perception subjective des Allemands que de saisir a contrario
comment les Français se sont eux-mêmes perçus au lendemain d'un conflit toujours très présent
dans leur mémoire collective.